Projet scientifique de l'UR Mondes germaniques et nord-européens | UR 1341 Contrat quinquennal 2024-2028

Présentation

Les champs de recherche de l’UR Mondes germaniques et nord-européens font écho à des débats sociétaux contemporains liés aux évolutions récentes qui touchent les mondes germaniques et nord-européens au niveau politique, écologique et numérique - des évolutions qu’il s’agit de comprendre par un retour réflexif sur le passé et grâce à de nouvelles approches théoriques.

Les recherches seront structurées autour de trois axes transversaux et interdisciplinaires, présentés ci-dessous, qui aspirent à fédérer les travaux relevant des mondes germaniques et des mondes nord-européens, en permettant aux collègues spécialistes d’études germaniques, néerlandaises et scandinaves, chercheurs et chercheuses en littérature, histoire des idées, civilisation, histoire culturelle, études culturelles et interculturelles, de travailler ensemble sur des thématiques communes et des corpus variés : littérature (prose, poésie, théâtre), discours politique, presse, textes philosophiques, iconographie (peinture, photographie, affiche politique...), arts de la scène (théâtre, danse), musique, cinéma, jeu vidéo, communication numérique... La diversité de ces corpus fait toute la richesse et l’originalité de notre équipe.

Les membres de l’UR interviennent dans au moins deux axes. Les doctorant·e·s peuvent choisir la thématique dans laquelle ils/elles souhaitent s’impliquer de manière privilégiée.

Les interactions avec d’autres aires culturelles, y compris extra-européennes, seront prises en compte au sein des trois axes, dans la perspective d’une histoire globale, s’inspirant des résultats des travaux antérieurs de l’axe « Mondes germaniques et espaces extra-européens » des contrats précédents.


Axe 1 : Dire le politique : médias et intermédialité dans les espaces germanique et nord-européen (XIXe-XXIe siècles)  Responsable : Emmanuel Behague

L’axe « Dire le politique : médias et intermédialité dans les espaces germanique et nord-européen (XIXe-XXIe siècles) » vise à faire collaborer de manière régulière des chercheurs et chercheuses travaillant sur des objets d’études différents. Les objets et les thèmes traités au sein de l’UR 1341 se caractérisent par une très grande variété. Afin de faire de cette diversité un atout, il apparaît cohérent de mettre au centre des recherches collectives la notion fédératrice de média, envisagé ici dans un sens large renvoyant aux diverses théories des médias et de l’intermédialité, ainsi, d’un point de vue disciplinaire, qu’aux media studies anglo-saxonnes et aux Medienwissenschaften de l’espace germanophones. On s’intéressera au fonctionnement des médias considérés individuellement comme vecteur de représentation d’une réalité politique, historique, sociale, culturelle, mais également à leur interaction, à leur interrogation réciproque, à leur hybridation. Par « intermédialité », on entendra donc tant les phénomènes de croisement entre les différents médias (texte et image en littérature par exemple, articulation texte-iconographie dans le discours de presse, image et corps sur la scène...) que le transfert d’un média à un autre (adaptation cinématographique d’une œuvre littéraire par exemple). Dans un objectif de fédération des recherches, le terme « politique » est ici à prendre au sens large. Subsumant l’ensemble des phénomènes caractérisant la vie de la cité tout en constituant l’objet du débat public, il renvoie tout autant aux problématiques mémorielles, aux idéologies, à la construction et à la déconstruction des identités collectives, à la vie politique, aux problématiques sociales.

Les travaux s’inscriront dans la poursuite de certaines problématiques explorées durant le quadriennal 2018-2022, notamment dans l’axe « L’espace public des pays germanophones et l’espace public européen », l’axe « Mondes germaniques et espace extra-européens » et l’axe « Interférences culturelles et réceptions mutuelles en Europe du Nord ».

Quatre thématiques, qui entrent parfois en résonance, ont été (provisoirement) identifiées :

Images et actes d’images

Qu’il s’agisse du cinéma, de la photographie ou de toute forme d’iconographie, les images seront ici abordées par-delà leur simple fonction d’illustration, dans la perspective de l’histoire visuelle, dans leur tridimensionnalité : les images comme sources, comme médias et comme « forces génératives » (Bilder als Quelle, Bilder als Medien, Bilder als generative Kräfte. Cf Gerhard Paul, Visual History 3.0). On s’interrogera donc sur la façon dont les images, objet d’étude à part entière, interviennent dans l’espace public, véhiculent explicitement ou implicitement des représentations collectives, produisent délibérément ou involontairement des effets et déclenchent des processus collectifs. La théorie des actes d’images (Bildakttheorie) de Horst Bredekamp pourra constituer un des soubassements théoriques de cette approche. La communication politique occupera ici une place centrale, qu’il s’agisse de l’utilisation de la symbolique à des fins de construction de l’identité nationale, des arts visuels ou de l’iconographie en contexte électoral.

Identités et territoires

On s’attachera ici à développer, dans divers contextes historiques, le rapport entre l’espace physique (géographique, national, international) et l’articulation d’un discours portant sur l’identité collective, qu’il s’agisse de l’imaginer, de lui donner forme, de la consolider ou au contraire d’en déconstruire les représentations. Cette articulation passe par divers médias, du discours médiatique au sens étroit aux arts de la scène (on pensera par exemple ici au concept de « postmigrantisches Theater » dans les pays de langue allemande), en passant par le cinéma, la photographie (photographie coloniale, traitement photographique des phénomènes migratoires contemporains), la littérature, à travers les récits de voyage ou les musées (par exemple en ce qui concerne la représentation du passé allemand en Europe centrale et Europe de l’Est). La mise en contact de cultures différentes dans un espace donné occupera une place importante dans ces recherches, mais également les phénomènes d’identification identitaire à un territoire physique dans une dynamique d’appropriation. La recherche collective autour de ces questions appliquée à des thématiques fédératrices pourra permettre une approche comparative susceptible de dégager des paradigmes discursifs communs articulés dans des médias différents, la pratique de stratégies intermédiales, ou encore, dans une approche diachronique la déconstruction de discours identitaires à travers le changement du média.

Les vecteurs de la mémoire

L’élaboration du discours mémoriel, qu’il soit national ou transnational, délibéré (dans le cadre des usages politique du passé) ou critique, constitue un objet essentiel de la médiation. De la littérature de prose au discours politique en passant par la série, toute représentation du passé est historique en ce qu’elle est impactée par le contexte de son émergence. On s’intéressera donc à la façon dont les œuvres littéraires et artistiques ainsi que le discours mémoriel relevant du champ politique porte la marque du présent lorsqu’il se saisit du passé. Ces représentations ne s’en inscrivent pas moins dans un continuum temporel, et répondent à d’autres formes de médiation. L’intermédialité sera ici pensée comme la relecture médiale d’une médiation antérieure, comme une « re-médiation » dans le sens que David Bolter et Richard Grusin par exemple donnent à ce terme. Si « le médium est le message », pour reprendre l’expression célèbre de Marshall Mac Luhan, le transfert d’un média à un autre transforme inévitablement le contenu de ce message. En lien avec l’histoire politique et culturelle des pays de langue allemande, mais également avec celle d’un espace transnational, on s’interrogera donc sur la construction littéraire, visuelle, sonore du passé, mais également à la relecture du discours mémoriel d’ordre politique, qu’elle en constitue la critique ou encore, à son insu parfois, la confirmation.

Performer le politique

Par-delà le sens étroit que lui donne les performance studies notamment conceptualisées dans les pays anglo-saxons dans les années 1960, le concept de performance a progressivement fait l’objet plus récemment d’un élargissement pour devenir un outil transversal permettant de penser les phénomènes esthétiques en ce qu’ils produisent – ou cherchent à produire – des effets de transformation du réel. La présence dans l’équipe de chercheurs et de chercheuses travaillant notamment sur les arts de la scène (texte, scène) ou sur la musique invite donc à engager une recherche collective plus spécifiquement consacrées à l’analyse des médias dans de tels processus. Dans le champ plus spécifique du théâtre, on pourra, dans le sillage de travaux déjà entrepris durant le quadriennal 2018-2022, s’interroger sur l’intermédialité comme collaboration des vecteurs de significations (corps, image, texte, objet) et sur sa contribution à un renouvellement du genre directement liés à d’autres formes discursives situées en dehors du périmètre des arts. Une place sera par ailleurs faite aux phénomènes de circulation « transnationale » des discours.


Axe 2 : Le défi des humanités environnementales : repenser les agencements entre nature et culture depuis le XVIIIe siècle  Responsable : Aurélie Choné

Dans le contexte des débats environnementaux et climatiques des dernières décennies, notamment sur l’Anthropocène, cet axe réunit les collègues et doctorant·e·s autour des enjeux épistémologiques, politiques et sociaux des humanités environnementales - nouveau paradigme qui vise à repenser les relations entre humains et non-humains au-delà de la simple opposition nature/culture.

Différents champs de recherche et approches théoriques seront mobilisés pour analyser les aspects culturels, littéraires, scientifiques, techniques, religieux, politiques des discours et pratiques de la nature : écocritique, géocritique, géopoétique, écoféminisme, études animales littéraires et culturelles, zoopoétique, humanités végétales (plant humanities), littérature et éthique, littérature et sciences, études visuelles, études postcoloniales ; histoire globale ; posthumanismes.

Cet axe s’appuie sur les travaux déjà menés dans le cadre de l’axe transversal du contrat quinquennal 2013-2017 « Conscience environnementale et alternatives écologiques dans les mondes germaniques et nordiques du XVIIIe siècle à nos jours » (resp. A. Choné, M. Cluet) et de l’axe 4 du contrat 2018-2022 « Configurations et reconfigurations du partage entre nature et culture depuis le XVIIIe siècle » (resp. A. Choné, C. Repussard). Plusieurs programmes de recherche ont été menés au cours des dernières années, dans le domaine des études animales (programme MISHA 2017-2018 « La rencontre homme-animal au croisement de la religion, de la culture et de la science. Généalogie et perspectives. », resp. A. Choné, C. Repussard), des humanités environnementales (Programme Formation-Recherche 2016-2018 du Centre Interdisciplinaire d’Études et de Recherches sur l’Allemagne « Circulations et renouvellement des savoirs sur la nature et l’environnement en France et en Allemagne : questionner les Humanités environnementales », co-resp. A. Choné), du trans- et posthumanisme (PFR Ciera 2019-2021 « Dépasser les bornes ? Quelle « politique » pour la littérature de science-fiction en France et en Allemagne ? », resp. Catherine Repussard) et des relations entre nature et psyché (programme EUROCAMPUS 2018-2019, fonds seed money « Konjunkturen des Unbewussten/ Conjonctures de l'inconscient », co-resp. Christine Maillard).

Deux programmes sont en cours sur les thématiques du paysage (programme MISHA 2021-2023 « Pensée du paysage et pratiques artistiques de l’espace à l’heure de l’anthropocène », co-porteur Emmanuel Béhague) et des liens entre nature et religion (programme ANR-DFG 2022-2024 « Esthétique du protestantisme en Scandinavie du 19e au 21e siècle », co-porteur Thomas Mohnike). Un dossier de programme trilatéral Allemagne-France-Italie de la Villa Vigoni a été déposé par Aurélie Choné pour 2023-2025 : « Faszination und Trauer. Kulturvergleichende Blicke auf Ästhetiken von Biodiversität, Artensterben und künstlerischer Restitution ».

Les problématiques actuelles (XXe-XXIe siècles) seront abordées sous l’angle diachronique, à travers des approches régionale(s), nationale(s) et comparatives (franco-allemand) ainsi qu’une synergie transnationale, et éclairées notamment à partir du tournant du XXe siècle (Lebensreform en particulier) et du tournant du XIXe siècle (période romantique). Quatre thématiques principales sont retenues, qui présentent de nombreux points de convergence :

Rhétoriques, représentations et pratiques de la nature du XVIIIe siècle à l’ère de l'anthropocène

Cette thématique se focalise sur l’étude des représentations de la nature (proche ou lointaine), notamment des paysages (des ruines contemporaines à l’univers arctique). Le rôle joué par les peuples autochtones (sames par exemple) et par les non-humains dans ces représentations sera exploré, notamment à travers la dimension symbolique de certains animaux, parfois très liée au réchauffement climatique (ours polaires, rennes). La question de l’agentivité du végétal, du minéral, des animaux et des objets dans la littérature et la pensée de langue allemande sera au centre des travaux. La place de la nature au théâtre, ses liens avec le nature writing, son évocation scénographique mais aussi dramaturgique (dans un théâtre officiel/institutionnel, mais aussi dans le Freies Theater) seront étudiés. Les discours seront analysés en lien avec des pratiques, culturelles, artistiques (théâtre de verdure par exemple) ou politiques (communautés alternatives liées à la Lebensreform, alternatives écologiques, agricultures alternatives...). Les problématiques actuelles seront éclairées à la lumière de la période autour de 1900, qui est elle-même l’héritière de visions, représentations, imaginaires, mais aussi projets utopiques ancrées pour la plupart dans des approches intimement liées au romantisme, lesquelles cherchent à faire émerger un « homme nouveau », vivant en harmonie avec son milieu naturel (plantes, animaux...) et avec ses congénères (mouvements pacifistes et anarchistes...).

Maltraitances animales et végétales : quelles résiliences possibles ?

La seconde thématique est consacrée à la question de la domination et de la maltraitance de la nature (maltraitance envers les paysages, les animaux, les forêts, les territoires...) et aux réponses qui lui sont apportées. On abordera la question de la maltraitance autant du point de vue de l’histoire culturelle (élevage intensif et protection animale, destruction des forêts...) que des études littéraires et de l’écriture poétique. On étudiera ces questions en lien à une critique sociale et politique plus globale, notamment de la société capitaliste et patriarcale (on pense par exemple à l’importance des rapports entre hommes et femmes chez des auteurs comme Mikael Vogel ou Marlen Haushofer). Les questions liées à l’éthique (land ethic, éthique animale, éthique environnementale...) et au genre (écoféminisme) dans les arts et la littérature seront au cœur de cette thématique. Seront notamment abordés le rôle éthique, psychologique et politique de la littérature en terme de résilience face à la crise environnementale, ainsi que ses ambivalences, en termes d’instrumentalisation politique par exemple.

Discours religieux et politiques entre sciences, arts et littératures

La troisième thématique porte sur l’intrication de différents types de discours sur la nature, qu’il s’agisse de discours scientifiques (biologie, écologie, éthologie...), philosophiques (Naturphilosophie romantique, hermétisme, vitalisme, cosmisme, holisme...) et religieux/spirituels/ésotériques (christianisme, nouveaux mouvements religieux, religions de la nature, Naturmystik, alchimie...). A l’ère de l’anthropocène, la peur de l’effondrement à l’échelle planétaire s’exprime dans des discours alarmistes dont la rhétorique est intéressante à analyser (figures de style, métaphores, oxymores...). La dimension eschatologique de ce catastrophisme apocalyptique témoigne de l’imbrication des discours sur la nature, la science et la religion. Des conceptions alternatives au « naturalisme occidental » (Descola) comme l’animisme (chez les sames par exemple), leur mise en pratique, ainsi que leur éventuelle instrumentalisation politique (à des fins identitaires, par exemple en Scandinavie) seront analysées. On s’intéressera à l’articulation entre le religieux (ou le spirituel), la morale et la politique, dans les discours sur la nature (écosophie, écopsychologie, écospiritualité...), les discours écologiques (discours des Verts sur le progrès, écologie profonde, écologie radicale, mysticisme et sacralisation de la nature en Scandinavie...) et dans certains mouvements sociétaux (anti-automobilisme...).

Les ambivalences de la préservation de l’environnement et du rapport à la technique

La quatrième thématique aborde la protection de l’environnement, notamment la question du choix entre la sanctuarisation de certains espaces et la construction d’un « monde commun » entre humains et non-humains (Latour). La protection des paysages peut passer par la sacralisation de la nature, par exemple la création de parcs naturels et concomitamment la muséification ou sanctuarisation des centres-villes – des projets qui soulèvent un certain nombre de résistances (on peut penser par exemple aux résistances à l’installation de parcs d’éoliennes ou de parcs nationaux en Allemagne). Seront étudiés à la fois des textes cherchant à mettre en garde face à l’évolution et au progrès, et des textes témoignant de la volonté de maîtrise et de domination de la nature à travers le développement des sciences et des technologies. Ces deux tendances concomitantes – rejet du développement technologique cherchant une ‘reconnexion’ à l’environnement, et fascination pour le développement scientifique (homme augmenté, cyborgisation, évolution au sein d’univers parallèles, multivers...) – sont déjà esquissées à l’époque romantique, puis autour de 1900, et débattues aujourd’hui en lien avec la questio du transhumanisme et du posthumanisme (corps prothétique, amélioré ou augmenté). Elles seront analysées en lien à la question de l’émergence possible d’un Homme nouveau aux contours repensés (proximité, voire fusion avec la machine, avec l’animal, les plantes...) et au dépassement de l’opposition entre nature et culture.


Axe 3 : Repenser les études germaniques et nord-européennes par les humanités numériques  Responsable : Thomas Mohnike

La transformation des médias que nous vivons aujourd’hui est à comparer aux révolutions précédentes des savoirs telles que l'invention de l'écriture il y a 5000 à 6000 ans, de l'imprimerie au XVe siècle, les presses rapides du XIXe siècle avec l'invention des quotidiens et des magazines spécialisés, ainsi que les médias de transmission des images en mouvement (cinéma, télévision, etc.). Comme les précédentes révolutions médiatiques, les changements actuels ont un impact sur le savoir scientifique. Les outils numériques donnent la possibilité d'accéder aux sources de notre savoir d'une manière totalement nouvelle avec des méthodes et des réflexions théoriques qui restent à mener. En même temps, il est nécessaire de réfléchir à la manière de décrire le système médiatique précédant la révolution numérique, d'historiciser ce passé proche, mais suffisamment distinct de la réalité actuelle pour pouvoir en constater la profonde différence.

Dans cette perspective, il est impératif de restructurer et de repenser les études en sciences humaines plus que nous n'avons pu le faire jusqu'à présent. L’axe de recherche entreprendra une triple action - d’un côté, les chercheurs vont mener des projets qui utilisent des techniques qui peuvent être considérées comme relevant des humanités numériques, d’autre côté, il s’agit de réfléchir à l’impact de ces méthodes sur nos champs de savoir.

Le travail de cet axe se déclinera autour de trois approches : 1. Application : la réalisation de projets  de recherche utilisant des nouvelles approches numériques, y compris le développement de nouveaux outils ; 2. Didactique : la formation des membres de l’UR et au-delà à ces nouveaux outils et nouvelles techniques en vue de leur impact aussi sur les enseignements au niveau Master ; 3. Réflexif : la réflexion sur la façon dont le changement médiatique a un impact sur nos disciplines et nos sociétés - et la façon dont nous pensons l’histoire. Bien évidemment, ces trois approches interagissent entre elles ainsi qu’avec le travail des deux autres axes de notre UR.

Application

Au cours du prochain contrat, nous allons réaliser plusieurs projet qui reposent sur les techniques des humanités numériques. Ils reposent sur un certain nombre d’outils et de partenariats ; la focalisation sur certains de ces outils facilitera l’échange et la collaboration. Bien évidemment, les principes d’Open Science seront respectés. Une première série de réalisations concerne des projets de cartographie historique des acteurs et des médiateurs culturels - soit en vue des travaux dans l’axe 1, soit en vue des travaux de l’axe 2. Ils reposent le plus souvent sur le logiciel de base de données heurist, dans la maintenance est assurée par le TGIR Huma-Num.

  • Traduction de la poésie française dans les pays de langue allemande - Traduction de la poésie germanophone dans les pays francophone (porteur : Aurélie Le Née)
  • Atlas des réseaux de l’artiste danois Asger Jorn (porteur : Raphaël Jamet, une collaboration avec le Museum Jorn est prévue)
  • Médiateurs du Nord - cartographie des réseaux des acteurs et médias notamment européens qui s’engageaient dans la transmission des représentations sociales et culturels des pays du Nord depuis 1500. Une première version du projet est consultable sur https://heurist.humanum.fr/heurist/?db=tmohn_actors&website&id=3465. (porteur : Thomas Mohnike)
  • Cartographier les savoirs dans le Finnmark. Le cas d’Ellisif Wessel (porteur : Alexandre Zeitler)

Un deuxième groupe de réalisations sera articulé autour d’un logiciel que nous sommes en train de
développer depuis 2019 - le Laboratoire des mythèmes (mythemes.unistra.fr, développé par Ludovic Strappazzon, Direction numérique de l’Unistra, et Thomas Mohnike). Ce logiciel sert à tracer les unités narratives constitutives d’un récit - les mythèmes - dans des grands corpus narratifs européens depuis le Moyen-Âge et étudier ainsi le changement de la grammaire du savoir. Le logiciel est conçu pour un travail collaboratif et repose sur des principes d’Open Science. S’il est nécessaire d’avoir un identifiant pour intégrer ses propres corpus, les résultats d’analyse sont ouverts à tout public intéressé. Dans les années à venir, il s’agit de tester et d’élaborer les méthodes déjà mises en place et d’en tirer les conclusions. Trois grands corpus sont envisagés

  • L’exploration et l’exploitation du Grand Nord (cf axe 1 et 2 : politique et nature)
  • La réception et circulation des mythes nordiques et du Moyen-Âge scandinave (cf Axe 1  : Politique et intermédialité)
  • L’écriture de la nature (cf axe 2 : Nature).

Didactique

Dans cette approche, il s’agit de travailler sur la formation collaborative à l’usage des outils numériques et d’un autre côté à la réflexion sur la diffusion des résultats. En collaboration avec la Plateforme Humanités Numériques | PHUN de la MISHA et le Datalab de la BNU, nous établissons des rencontres régulières de formation et d’échange sur les outils qui nous utilisons pour nos travaux - notamment Heurist et le laboratoire des mythèmes. S’y ajoutent des séminaires autour de l’application des outils de la visualisation comme Gephi pour les réseaux et QGIS pour la cartographie. Il est envisagé d’ouvrir ce travail non seulement à tous les membres de l’UR, mais aussi à tout chercheur intéressé des URs dans la proximité disciplinaire comme SEARCH, CHER, GEO, ARCHE, ILLE etc. La valorisation de ces travaux et des autres travaux de l’UR se fera par des canaux des diffusions traditionnelles comme des participations à des colloques ou des articles de revue, mais aussi par la création d’un portail de ressources didactiques qui servira à la diffusion pour tout public, y compris pour servir à la formation des étudiants, enseignants d’école et élèves. Il est envisagé que ce portail de ressources soit réalisé comme une plateforme inter-axe et inter-équipe autour des sujets sur lesquels nous travaillons dans une perspective d’histoire culturelle qui aident aussi à mettre en évidence les interférences et collaborations entre les différents domaines, notamment des germanistes, néerlandisants et scandinavistes. Il s’agit aussi de travailler sur la question du rendu, de la lisibilité des productions (pour un format papier, accessibilité, vulgarisation et didactique des résultats) et de la valorisation collective des projets individuels, y compris les travaux des masterants, doctorants voire des projets pédagogiques menés avec des licences qui seront ainsi adossés à la recherche de façon pratique. Dans ce travail, nous pouvons profiter des expériences et outils qui étaient déployés dans le cadre des projets ANR et iDEX menés par des membres de notre UR 2020-2022, notamment en ce qui concerne la production des vidéos didactiques.

Réflexion

Comme nous l’avons mentionné en introduction, il s’agit aussi de réfléchir sur l’impact de ce changement médiatique et des nouvelles méthodes sur nos champs de savoir. En effet, toute révolution médiatique a eu des conséquences sur la production et diffusion du savoir, sur la négociation des décisions sociétales, notamment politiques. Ce travail de réflexion sera mené tout au long des travaux des axes, notamment lors des séminaires de recherche qui seront organisé de façon régulière. Nous prévoyons également des colloques, journées d’études et expositions qui s’inscrivent de manière transversale entre les axes de l’UR - et qui reflètent ces interrogations autour d’études de cas pertinentes. Le colloque "Les avant-gardes germanophones et nord européennes et l'objet livre" prévu à l'automne 2024 pourrait être par exemple l'occasion de réfléchir, de manière diffuse et transversale, à ce que les mutations, évolutions et transformations de l'objet livre par les artistes, notamment avec l'aide du numérique, peuvent engendrer comme changement dans notre manière de mener nos recherches (de l'accès à la restitution, en passant par les réflexions induites par de tels médias). Un colloque autour de l’impact du savoir numérique sur nos disciplines est prévu pour 2025. Il s’agit de réunir des grands acteurs des humanités numériques dans nos disciplines pour réfléchir sur l’impact sociétal de nos travaux. Une exposition à la BNU autour des Archives du Nord réfléchira sur les changements médiatiques du savoir du Nord et ses implications sociétales et politiques depuis le Moyen-Âge. Elle est envisagé pour 2026.