Le lien entre identité religieuse luthérienne et culture du consensus dans l’univers scandinave (et en Suède plus particulièrement) a fait l’objet, au cours des dernières décennies, d’analyses fécondes – qui ont mis en lumière les sources religieuses et doctrinaires de différents traits des « modèles nordiques » : de l’éducation à l’État providence, de la musique à l’urbanisme. Dans la notion de St atskyrka – que la folkhem sociale-démocrate a préservée jusqu’à l’aube du 3e millénaire – une notion de légitimité politique est foncièrement attachée au respect d’une orthodoxie. Dès lors, sur les notions de pluralisme, ou de désordre spirituels, s’étend l’ombre de l’hérésie.
Le programme du séminaire présenté se propose de saisir les implications culturelles de ce modèle par ses marges en se penchant sur des trajectoires intellectuelles et biographiques marquées à la fois par l’altérité religieuse et par la remise en cause « scandaleuse», sous différentes formes (récit de voyage, conversion…) de l’ethos et de la spiritualité dominantes.
Dans quelques cas, ces postures (une autre face, pourrait-on spéculer, du primat de la conscience individuelle dans l’échelle des valeurs protestantes) amènent au scandale ; dans d’autres, au rejet, à l’exil intérieur, ou à l’émigration. Parfois à une contribution féconde au débat d’idées, dont la singularité s’enracine, aussi, dans une vision du monde antagoniste au mainstream.
Par la diversité des exemples régionaux et des cas historiques traités (du St ormaktstid à la folkhem) le programme essaie de capturer la continuité, mais aussi les infl exions diverses du phénomène de la dissidence religieuse (entre résistance culturelle et choix individuel) – en ouvrant vers le multiculturalisme contemporain, qui fait de l’altérité non plus la fi gure du péché, mais une dimension (sous certaines conditions) légitime et valorisée.